Le point de vue du Yoga et de l’Ayurveda sur la dépression et comment la surmonter
Traduction d’ un article du Docteur David Frawley – 6 décembre 2021
La dépression s’est répandue ces dernières années, et encore plus pendant cette pandémie où les gens doivent passer plus de temps seuls, sont limités dans leurs mouvements, avec une incertitude quant à l’avenir. Elle peut concerner tout le monde, quelque soit l’âge, l’aisance matérielle et le niveau d’instruction.
Quelle est la cause de la dépression et comment pouvons-nous y remédier efficacement? Les explications sont nombreuses. Cependant, regardons au-delà des théories compliquées ou de l’analyse chimique. Pour le dire simplement, la cause de la dépression est une stimulation excessive et un esprit tourné vers l’extérieur. Plus nous dépendons de la stimulation externe pour nous motiver, plus nous deviendrons probablement déprimés avec le temps. Il y a plusieurs raisons à cela.
Tout d’abord, chaque fois qu’une stimulation à laquelle nous nous sommes habitués est réduite ou retirée, nous sommes susceptibles de devenir déprimés, ou de ressentir un syndrome de sevrage, car nous devenons dépendants de la stimulation pour dynamiser notre système nerveux et notre esprit. La stimulation provoque toujours un certain degré de dépendance. Cela inclut la stimulation des médias, mais aussi l’activité sociale quelque soit sa forme.
Deuxièmement, avec le temps, nous sommes susceptibles de nous ennuyer ou de déprimer car la répétition d’une stimulation lui fait perdre sa nouveauté. Le seuil à partir duquel une stimulation fait effet augmente à mesure que nous en faisons régulièrement l’expérience. C’est pourquoi nous avons besoin de formes de stimulation toujours nouvelles.
Stimulation des médias et médecine médicamenteuse
Dans le monde de la haute technologie, nous sommes soumis à plus de stimulation et de divertissement qu’à toute autre époque précédente. Beaucoup de personnes sont branchées toute la journée avec de la musique, des vidéos, des médias sociaux ou Internet, se fermant au reste de la vie et aux autres. Nous ne savons pas comment être seul, silencieux, dans la nature ou comment avoir des relations directes avec qui que ce soit.
En plus d’une stimulation sensorielle étendue, beaucoup d’entre nous prennent des drogues récréatives ou médicinales qui ont des effets secondaires addictifs et épuisants. Il y a une augmentation importante de la consommation d’opiacés que les gens prennent pour soulager la douleur, et des dépendances généralisées aux opiacés, pour lesquelles il existe des formes plus addictives. La dépression peut être liée à des dépendances de différents types, des dépendances sensorielles aux dépendances aux substances. La dépression est enracinée dans notre style de vie qui cherche le bonheur vers l’extérieur. Nous pouvons facilement nous sentir déprimés par l’état perturbé du monde aujourd’hui et les nouveaux dangers de l’ère du coronavirus.
Dépression et chimie du cerveau
La science médicale affirme que la dépression est le produit d’une mauvaise chimie dans notre cerveau, qui peut être traitée avec des médicaments comme un problème chimique. Il est proposé pour cela une nouvelle gamme de médicaments anti-dépression. Et pourtant, malgré tous les médicaments antidépresseurs consommés, nous semblons devenir de plus en plus déprimés. Certains médicaments anti-dépression ont en outre des effets secondaires nous rendant plus déprimés encore. Bien que de tels médicaments anti-dépression puissent être nécessaires dans certains cas, il existe d’autres alternatives.
La médecine médicamenteuse suggère que nous ne sommes peut-être pas personnellement responsables de tels déséquilibres de la chimie de notre cerveau. Il suggère que nous puissions être victimes de la chimie de notre cerveau, qui dépend de facteurs indépendants de notre volonté, à commencer par la génétique. Croire en cette hypothèse peut réduire notre capacité à contrôler ou à améliorer notre propre santé et notre bien-être. Si nous sommes les victimes de la chimie du cerveau, quelle responsabilité avons-nous vraiment dans la vie?
Dépression et problèmes de comportement
La plupart des dépressions sont en lien avec le mode de vie. L’activité excessive, la stimulation excessive et notre dissociation du monde de la nature nous laissent épuisés. Le yoga nous enseigne que la stimulation excessive (guna Rajas) conduit à l’inertie et à la dépression (guna Tamas) lorsque nous nous épuisons, nous brûlons ou devenons simplement trop sensibles, agités et stressés.
Dans notre société individualiste, nous finissons souvent seuls, car la famille et la communauté sont subordonnées aux réalisations individuelles. Cela nous rend plus dépendants de la stimulation médiatique pour combler le vide de nos vies. La solitude et la dépression vont souvent de pair, exacerbées à l’ère de la pandémie.
La dépression n’est rien d’autre qu’une faible énergie dans l’esprit ou au niveau psychologique. Tout comme nous avons tous des périodes de faible énergie physique en raison d’une activité excessive, nous avons aussi des périodes de faible énergie mentale en conséquence d’un trop grand travail mental ou émotionnel ou d’une stimulation trop importante. Tout comme la faible énergie physique repose sur le manque d’exercice et une mauvaise nutrition, la faible énergie psychologique repose sur le manque d’exercice mental et une mauvaise nutrition pour l’esprit. À l’ère de la pandémie, notre énergie physique et mentale a tendance à diminuer.
Combien d’entre nous exercent leur esprit avec des exercices de concentration ? Avez-vous examiné la nutrition mentale que vous absorbez à travers vos sens? Par le biais des médias, nous laissons entrer dans nos propres esprits des gens que nous ne laisserions jamais entrer dans nos maisons. Nous regardons des programmes pleins de violence, de destruction et d’émotions négatives (…).
Ce que la dépression peut nous apprendre
Dans le traitement de la dépression, nous ne devrions pas cibler la dépression comme l’ennemi, comme un agent pathogène à détruire, quelque chose venant de l’extérieur. Nous devrions chercher à comprendre sa cause en nous, et le message qu’elle nous envoie sur la façon dont nous vivons et pensons. Nous devrions essayer de comprendre ce que notre dépression nous apprend sur notre situation dans la vie.
La dépression, comme la douleur, peut être le symptôme d’un problème plus profond. La dépression peut nous dire qu’il y a quelque chose d’insatisfaisant dans nos vies – que nous avons besoin de changer fondamentalement qui nous sommes ou comment nous fonctionnons dans le monde. Cela peut nous dire que nous n’utilisons pas notre temps à bon escient et que nous devons changer notre routine quotidienne. Sur le plan spirituel, la dépression peut nous enseigner que sans aucune pratique de méditation ou sans valeurs profondes, le monde extérieur finira par nous laisser un sentiment de vide.
Comportementales et attitudes pour contrer la dépression
Comment devrions-nous faire face à la dépression?
Elle peut être traitée de façon naturelle. Tout ce qui manque de prana ou de force vitale ne peut pas vraiment élever notre esprit à long terme. Nous devons apprendre à nous extraire des sources de stimulation externe et développer nos propres créativité, motivation et discipline internes. La dépression peut être un signe que nous devons nous détacher, et passer à un nouveau niveau de conscience.
Pour aller au-delà de la dépression, nous devons assumer la responsabilité karmique de qui nous sommes. Nous devrions poursuivre une vie de conscience supérieure plutôt que de simples plaisirs personnels et de succès extérieurs. Nous devons reconnaître que notre état d’esprit est enraciné dans nos propres valeurs, actions et motivations. Nous devons cesser de blâmer notre corps, nos parents ou même la société pour ce que nous sommes. Nous devons responsabiliser notre être intérieur. De tels changements de comportement ne peuvent pas se produire du jour au lendemain, mais nous pouvons les introduire progressivement.
Des choses simples que nous pouvons faire pour la dépression dans le Yoga et l’Ayurveda
Utilisez des arômes stimulants ou de l’encens comme le champak, le frangipanier, le camphre, l’eucalyptus, la menthe, la sauge ou le tulsi, ou prenez des plantes comme le tulsi, le brahmi ou le calamus pour éclaircir l’esprit. Utilisez des huiles de nasya pour dégager vos sinus ou un pot neti pour les nettoyer afin d’apporter plus de prana dans la tête. Pratiquez le pranayama pour apporter une énergie plus profonde au cerveau. Tant que nos sinus et nos poumons sont ouverts et que notre respiration est profonde et pleine, il est difficile de tomber dans la dépression.
Chantez des mantras comme Hreem, Shreem ou Om Namah Shivaya, ou tout autre mantra auquel vous vous sentez attaché, ou répétez-les silencieusement pour faire circuler votre énergie. Utilisez des tisanes ayurvédiques comme le tulsi, le calamus ou le brahmi pour améliorer la circulation vers le cerveau, ou des herbes calmantes naturelles comme l’huile de bois de santal appliquée sur la tête.
Sortez dans la nature, faites une randonnée dans les collines, à l’océan, près des rivières ou des lacs, allez nager ou pratiquez les asanas. Nous devons bouger notre corps et notre prana. Faites des postures inversées pour attirer l’énergie dans le cerveau.
Apprenez à vous relier à la vie et à l’univers à travers le ciel, les eaux, la Terre et les montagnes, les arbres, les fleurs et les herbes, et toutes les créatures, grandes et petites. Nous devons ouvrir nos horizons mentaux à l’espace illimité de la conscience. Ce n’est que si nous donnons à l’esprit de l’espace en lui-même qu’il peut se guérir lui-même. Pour cela, nous devons être disposés à faire l’expérience du vide intérieur, qui finira par se remplir de conscience si nous y sommes réceptifs.
Effectuez un travail de Seva (service désintéressé) pour ceux qui sont dans des situations de vie plus difficiles que la vôtre. Essayez également de désencombrer votre chambre ou votre maison, pour aider à éliminer l’encombrement de votre esprit que la dépression implique souvent.
Méditez régulièrement matin et soir, cultivant une conscience de votre Soi intérieur et une conscience universelle.
Points de vue ayurvédiques sur la dépression
En termes ayurvédiques, les types Vata peuvent souffrir de dépression liée à la débilité (manque de vigueur) et à l’épuisement nerveux, même si’ils peuvent avoir beaucoup de hauts et de bas. Ils ont besoin d’une bonne alimentation et de repas réguliers, de relaxation, d’un massage à l’huile de sésame, d’herbes toniques comme l’ashwagandha et le bala, de plantes nervines comme le jatamamsi et le calamus.
Les personnes de type Kapha peuvent développer une dépression chronique lourde née du manque de mouvement, de la léthargie et du surpoids. Ils ont besoin de plus de mouvement et d’action physique et mentale. Ils ont besoin d’exercices plus forts, de pranayama et de svedana (thérapies de transpiration), et d’herbes épicées comme le gingembre, la cardamome, le tulsi et la cannelle pour favoriser la digestion et la circulation.
Les types Pitta peuvent devenir déprimés lorsqu’ils ne parviennent pas à atteindre leurs objectifs personnels ou lorsque leurs efforts sont bloqués. La dépression va souvent de pair avec la colère. Ils ont besoin de se calmer, en cultivant le pardon et la compassion, avec des herbes rafraîchissantes comme le brahmi, le jatamamsi, le shankha pushpi ou le manduka parni (bacopa), ainsi que le ghee Brahmi.
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Essentiellement, pour sortir de la dépression, nous devons affirmer notre propre Soi supérieur et ne pas être submergés par le monde extérieur, quelles que soient ses complications.
En tant qu’être divin et conscience immortelle, votre vraie nature est Être-Conscience-Béatitude (Sat Chit Ananda) au-delà du corps et de l’esprit !
David Frawley (Vamadeva Shastri)